mardi 20 janvier 2009

Projections et Réel

Le microcosme se construit à l'image du macrocosme qui se projette dans le microcosme. Une limite sépare les deux. L'être humain ne vit que dans son microcosme, même quand il croit vivre le macrocosme. En gros c'est comme si nous étions dans une pièce qui par un jeu de miroir reflète sur un écran ce qui se passe devant la fenêtre et que nous étions assis devant cet écran croyant y voir la réalité alors que ce n'en est qu'une image. Nous ne quittons jamais notre chaise, et nous cherchons à comprendre le monde à travers cet écran.

Dans le monde du rêve nous sommes dans le domaine du microscosme. Lorsque nous dormons, nous repassons tous les films, car tout ou presque est conservé dans le subconscient, et nous montons un nouveau film avec les petits bouts de ceux que l'on a, un film qui nous convient.

Parfois par la fenêtre souffle une brise et nous appréhendons quelques éléments du réel. Parfois encore des êtres rentrent dans notre maison. ils peuvent venir des enfers comme des mondes angéliques, et ils viennent s'agiter devant notre écran, donnant un parfum de cauchemard, ou de nirvana à notre réalité. Mais qui s'est levé de sa chaise et a passé la fenêtre ?

Lorsque nous mourrons c'est encore pire. La maison disparait, il n'y a plus d'écran. Alors nous déroulons tous les films et nous construisons une réalité qui sera celle de leurs projections, cauchemardesque ou bienheureuse selon ce qu'aura été notre vie. Nous construisons notre domaine subtil un peu comme un monde onirique qui prend réalité. Mais il existe beaucoup de variantes à ce scénario. Je ne m'étalerai pas plus pour l'instant.

Parfois certains prennent conscience qu'il sont devant un écran, que tout est leur projection. Ils disent qu'ils s'éveillent. Alors le monde apparait tout entier à l'intérieur de soi, illusion de l'éveillé qui ne voit en fait que sa propre demeure. D'autres fois certains, à force de scruter leur écran pour y découvrir la réalité, tombent de leur chaise. La révélation est brutale. En général ils s'empressent d'y retourner rajoutant leur expérience à leur cinéma. Bien plus rare sont ceux qui se retournent, abandonnant les films et les histoires, ils ne sont plus rien et n'ont plus rien à quoi s'identifier. Alors ils découvrent la fenêtre, et voient poindre à travers elle un monde en 3D.

Et puis il y a celui qui s'est fait arraché de sa chaise, par la main de Dieu qui comme un voleur a violé sa maison, ses croyances et ses espérances. Celui-là s'est fait attrapé par le collet et brutalement s'est retrouvé jeté hors de chez lui. Nul ne peut sortir de sa demeure de lui-même...

L'image de la fenêtre est une analogie qui rend compte de la perception du réel. Celui qui n'est plus rien et ne s'identifie plus à rien n'a plus d'image de lui et perçoit les choses telles qu'elles sont, non à travers une image qui est toujours en 2D. C'est pour cela qu'il fait face à la fenêtre. Il n'y a pas besoin de prendre du recul, il n'y a plus personne dans la pièce, il est lui-même la pièce pour ainsi dire.

Lorsque l'on parle de l'identification, c'est celle de nos constructions mentales et psychiques. Libérez-vous en, et vous ne projeterez plus rien sur le monde. Pour autant le monde ne vous apparaîtra pas forcément transcendant, simplement vous le verrez tel qu'il est en fonction de votre nature, de votre sensibilité, de vos ouvertures. Si vous ne portez pas en vous la 4e, 5e ou 6e dimension, elles ne vous apparaitront pas pour autant.

L'analogie a ses limites. Si l'on ne projette plus on est dans la vacuité, ce qui nous permet de voir devant : un écran vide ; derrière : une fenêtre avec un paysage ; et autour : l'intérieur de la pièce et ses décorations auxquels nous n'avions peut-être jamais fait attention. On n'est libre que de soi.

Quittons un peu cette analogie. Toute brêche réalisé dans notre nature humaine et menant vers un accomplissement possède ses propres illusions. Chaque fois que l'on voit la réalité de manière plus profonde et élargie, croire que l'on voit tout, sais tout etc n'est que relatif avec notre perception antérieure. Et il faut souvent une réalisation plus profonde pour s'apercevoir de notre erreur, et une encore plus profonde pour voir la relativité de toutes les réalisations etc. La plupart tombent dans ce piège, certains recréent même une réalité qui parait plus réelle pour celui qui ne voient rien mais qui est en fait une illusion encore plus grande etc...

A quoi se fier donc ? A rien, nous sommes démunis, la sagesse montre qu'il n'y a pas vanité à accomplir quelque chose, que tout ou presque toutes nos investigations ne sont que des fuites et que le monde est d'un réalisme consternant, d'un existentialisme sans détour, que la vie pour être comprise ne peut être prise qu'à bras le corps, qu'il n'y a pas d'état salvateur, seulement des conséquences à nos prises de conscience et nos restructurations créatrice, que rien ne s'arrête nulle part, et que l'on peut tout expliquer par une chose et par son contraire, mais que la vérité est une et que personne ne peut nous l'enseigner. Comprenne qui pourra...

Jean-Michel Jutge

jeudi 8 janvier 2009

L'amour gnostique

Je voudrais donner quelques précisions sur ce qu'est l'amour qui s'exprime par la Lumière de Grâce, et ce qu'il n'est pas, car nous confondons trop souvent les sentiments, l'amour, l'affectivité, le désir, la séduction etc... et avons tendance à le voir selon nos propres images.

- L'amour dont il est question est gnostique, c'est-à-dire qu'il procède dans et par le Divin.

- Il est à la fois impersonnel et personnel, car il peut être là sans qu'il n'y ait personne, mais peut prendre les formes que la créativité divine lui modèle.

- Il ne se cherche pas lui-même ni ne se trouve, il est une grâce.

- Il prend sa place naturellement dans la relation humaine, sans que nous le sollicitions.

- Il se vit dans l'instant. Si nous cherchons à le poursuivre nous le quittons pour le désir. Si nous nous mettons à le contempler nous passons dans le narcissisme. Si nous le cultivons nous faisons du sentimentalisme.

- C'est par la joie de l'abandon de soi au divin qu'il peut naître, non parce que nous l'avons cherché mais parce qu'il est le résultat naturel de l'unité, et de l'unité avec l'autre, l'unité gnostique.

- Nous ne choisissons pas les chemins et les voies de l'amour divin. Dieu choisit.

- Il n'est pas affectivité et recherche de l'affectivité.

- Il n'est pas là pour nous remplir, même si ce peut être une conséquence.

- Il n'est pas le plaisir et encore moins la séduction, même si le plaisir dans nos vies n'est pas à rejeter. Ne nous laissons pas leurrer par le bien être que cet amour nous amène, car en réalité son expression totale nous demande un renoncement total à tout ce à quoi l'on est attaché et qui ne sert que soi-même.

- Il n'est pas la passion qui nait entre deux coeurs qui se sont reconnus dans leurs attentes mutuelles.

- Il n'est pas la sécurité psychologique ou affective à laquelle tout un chacun aspire légitimement, car les exigences de cet amour peuvent nous mettre dans une insécurité complète.

- Enfin les ruses du mental et du vital chercheront toujours à se saisir de cet amour là, l'utiliser à leur manière, et de tout ce qui peut procéder de la nature de Dieu pour le dénaturer, lui faire perdre sa pureté et sa vertu naturelle.

La transfiguration est la mutation de tout ce que nous connaissons en quelque chose que nous ne connaissons pas encore. En cela l'amour a aussi son rôle à jouer. Mais si le passage de cette mutation peut être agréable, joyeux, bienheureux, il peut tout autant être pénible lorsqu'il s'agit de mettre fin a tout ce qui fait parti du limité, du mensonger et de ce qui fait partis de nos structures naturelles et de nos conditionnements. Et dans ce cas l'amour ne passe pas par la douceur du coeur, mais par la fermeté de l'esprit divin.

Jean-Michel Jutge